L’ulcère gastrique est une affection fréquente et parfois grave, qui touche environ 10% de la population mondiale. Il s’agit d’une lésion qui se forme sur la paroi interne de l’estomac, à cause d’une agression de l’acide gastrique ou d’une infection bactérienne. L’ulcère gastrique peut provoquer des douleurs, des saignements, ou des perforations, et augmenter le risque de cancer de l’estomac. Il existe des traitements efficaces pour guérir l’ulcère gastrique, mais il faut aussi prévenir sa récidive en adoptant une bonne hygiène de vie et en évitant les facteurs de risque. Dans ce texte, je vais vous expliquer ce qu’est l’ulcère gastrique, quelles sont ses causes, sa physiopathologie, son diagnostic, son traitement, et ses complications.

L’ulcère gastrique est une érosion de la muqueuse de l’estomac, qui peut atteindre les couches profondes de la paroi gastrique. Il se présente sous la forme d’une plaie circulaire ou ovale, de quelques millimètres à plusieurs centimètres de diamètre. Il peut être unique ou multiple, et se situer dans différentes parties de l’estomac, comme le fundus, le corps, ou l’antre.
L’ulcère gastrique fait partie des ulcères peptiques, qui regroupent également les ulcères duodénaux (situés dans la première partie de l’intestin grêle) et les ulcères oesophagiens (situés dans l’oesophage). Les ulcères peptiques sont causés par une altération de l’équilibre entre les facteurs agressifs et les facteurs protecteurs de la muqueuse digestive

Les principales causes de l’ulcère gastrique sont les suivantes:
• L’infection par la bactérie Helicobacter pylori, qui colonise la muqueuse gastrique et provoque une inflammation chronique, une diminution de la production de mucus et de bicarbonate, et une augmentation de la sécrétion d’acide. H. pylori est responsable de plus de 80% des ulcères gastriques et de 90% des ulcères duodénaux.

Il se transmet par voie orale, par contact direct ou indirect avec des personnes ou des objets contaminés.
• La prise de médicaments anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), comme l’aspirine, l’ibuprofène, ou le naproxène, qui inhibent la synthèse des prostaglandines, des substances qui protègent la muqueuse gastrique en stimulant la production de mucus et de bicarbonate, et en régulant la sécrétion d’acide. Les AINS sont responsables de 15 à 20% des ulcères gastriques et de 5 à 10% des ulcères duodénaux. Ils sont souvent utilisés pour soulager la douleur, l’inflammation, ou la fièvre, mais ils peuvent aussi être prescrits pour prévenir des maladies cardiovasculaires ou des cancers.
• D’autres facteurs de risque, comme le tabagisme, l’alcoolisme, le stress, les brûlures étendues, les traumatismes, les interventions chirurgicales, ou certaines maladies, comme le syndrome de Zollinger-Ellison, une tumeur endocrine qui entraîne une hyperproduction d’acide gastrique.

La physiopathologie de l’ulcère gastrique repose sur un déséquilibre entre les facteurs agressifs et les facteurs protecteurs de la muqueuse gastrique.
Les facteurs agressifs sont principalement l’acide chlorhydrique et la pepsine, qui sont sécrétés par les cellules pariétales et les cellules principales de l’estomac, respectivement. L’acide chlorhydrique est nécessaire pour activer la pepsine, qui est une enzyme qui digère les protéines. L’acide et la pepsine peuvent endommager la muqueuse gastrique si leur concentration ou leur activité est trop élevée, ou si leur évacuation est retardée. L’infection par H. pylori et la prise d’AINS peuvent augmenter la production ou l’agressivité de l’acide et de la pepsine.
Les facteurs protecteurs sont principalement le mucus et le bicarbonate, qui sont sécrétés par les cellules muqueuses de l’estomac. Le mucus forme une couche visqueuse qui recouvre la muqueuse gastrique et la protège de l’acide et de la pepsine. Le bicarbonate est un tampon qui neutralise l’acide et maintient le pH de la muqueuse autour de 7. Les prostaglandines sont des hormones qui stimulent la sécrétion de mucus et de bicarbonate, et qui inhibent la sécrétion d’acide. L’infection par H. pylori et la prise d’AINS peuvent diminuer la production ou l’efficacité du mucus et du bicarbonate.
Lorsque les facteurs agressifs l’emportent sur les facteurs protecteurs, la muqueuse gastrique devient vulnérable et peut être attaquée par l’acide et la pepsine, qui créent une ulcération. L’ulcération peut saigner, s’infecter, ou se perforer, ce qui peut entraîner des complications graves.

Le diagnostic de l’ulcère gastrique repose sur les signes cliniques, les examens biologiques, et les examens endoscopiques.

Les signes cliniques sont les symptômes ressentis par le patient, qui peuvent être variés et non spécifiques. Le symptôme le plus fréquent est la douleur épigastrique, c’est-à-dire la douleur située au niveau de la partie supérieure de l’abdomen.

La douleur peut être décrite comme une brûlure, une faim douloureuse, ou une crampe. Elle peut être modérée ou intense, intermittente ou permanente, et être influencée par les repas, le jeûne, ou la prise d’antalgiques ou d’antiacides.

D’autres symptômes peuvent être associés, comme les nausées, les vomissements, les éructations, les brûlures d’estomac, la perte d’appétit, ou la perte de poids. Certains signes peuvent révéler une complication, comme le sang dans les vomissements ou les selles, l’anémie, la déshydratation, ou le choc.

Les examens biologiques sont les analyses de sang, d’urine, ou de selles, qui peuvent être réalisées pour confirmer ou infirmer le diagnostic, rechercher une cause, ou évaluer l’état du patient. Les examens biologiques peuvent inclure:
Une numération formule sanguine (NFS), pour mesurer le nombre et le taux d’hémoglobine des globules rouges, et détecter une éventuelle anémie due à un saignement chronique ou aigu.
Une recherche d’anticorps anti-H. pylori, pour dépister une infection par la bactérie, qui est la cause la plus fréquente de l’ulcère gastrique. Le test est simple et peu coûteux, mais il n’est pas très spécifique ni sensible, et il ne permet pas de distinguer une infection active d’une infection ancienne.
• Une recherche d’antigènes ou d’uréase de H. pylori dans les selles, pour confirmer une infection par la bactérie, qui est la cause la plus fréquente de l’ulcère gastrique. Le test est plus spécifique et sensible que la recherche d’anticorps, et il permet de vérifier l’éradication de la bactérie après le traitement.
• Un test respiratoire à l’urée marquée est un examen non invasif qui utilise une réaction chimique pour identifier la présence de la bactérie H. pylori dans l’estomac. Cette bactérie est capable de dégrader l’urée, une substance chimique qui contient de l’azote, en ammoniac et en dioxyde de carbone. Le test consiste à faire ingérer au patient de l’urée marquée par un isotope rare du carbone, soit le carbone-13, soit le carbone-14. Si la bactérie est présente, elle va libérer du dioxyde de carbone marqué, qui sera mesuré dans l’air expiré par le patient. Le test est simple, rapide et fiable, et il permet de confirmer ou d’infirmer l’infection par H. pylori, ainsi que de vérifier son éradication après un traitement antibiotique.

Le traitement de l’ulcère gastrique repose sur plusieurs mesures :

  • La prise d’antibiotiques pour éliminer la bactérie Helicobacter pylori si elle est présente. Il s’agit généralement d’une association de deux ou trois antibiotiques (amoxicilline, clarithromycine, métronidazole…) pendant 10 à 14 jours
  • La prise d’anti-sécrétoires pour réduire la production d’acide gastrique et favoriser la cicatrisation de l’ulcère. Il s’agit le plus souvent d’inhibiteurs de la pompe à protons (IPP) comme l’oméprazole, le pantoprazole, le lansoprazole… Le traitement dure 4 à 8 semaines selon le type et la localisation de l’ulcère
  • La prise d’antiacides ou de pansements gastriques pour neutraliser ou protéger la muqueuse de l’estomac. Ils peuvent être utilisés en complément des anti-sécrétoires pour soulager les symptômes
  • L’arrêt ou la diminution de la consommation de tabac, d’alcool, de café, de thé, de chocolat, d’épices et d’aliments irritants pour l’estomac. Ces substances peuvent aggraver l’ulcère ou retarder sa guérison
  • L’évitement ou la substitution des médicaments qui peuvent favoriser l’ulcère, comme les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) ou l’aspirine. Il faut demander conseil à son médecin avant de prendre ces médicaments, et privilégier le paracétamol comme antalgique
  • Le suivi médical régulier pour vérifier la cicatrisation de l’ulcère et prévenir les complications. Une endoscopie digestive haute est généralement réalisée après le traitement pour s’assurer de l’éradication de la bactérie Helicobacter pylori et de la disparition de l’ulcère.

Les complications de l’ulcère gastrique sont rares, mais elles peuvent être mortelles. Les complications de l’ulcère gastrique comprennent :
• Le saignement, qui est la complication la plus fréquente de l’ulcère gastrique. Il survient lorsque l’ulcère érode un vaisseau sanguin dans la paroi de l’estomac. Le saignement peut être léger ou sévère, et il peut provoquer des symptômes tels que l’hématémèse (vomissement de sang), la méléna (selles noires), l’anémie, l’hypotension ou le choc. Le saignement peut être traité par hémostase endoscopique, transfusion ou chirurgie, selon la sévérité et la source du saignement.
• La perforation, qui est la deuxième complication la plus fréquente de l’ulcère gastrique. Elle survient lorsque l’ulcère pénètre à travers toute l’épaisseur de la paroi de l’estomac, créant un trou qui laisse fuir le contenu gastrique dans la cavité abdominale. La perforation peut provoquer des symptômes tels que des douleurs abdominales soudaines et sévères, de la fièvre, des nausées, des vomissements, une péritonite (inflammation du péritoine, la membrane qui tapisse la cavité abdominale), ou une septicémie (une infection grave qui se propage dans tout le corps). La perforation peut être traitée par chirurgie, qui consiste à fermer le trou et à nettoyer la cavité abdominale.
• L’obstruction, qui est la troisième complication la plus fréquente de l’ulcère gastrique. Elle survient lorsque l’ulcère provoque un rétrécissement ou un blocage du pylore, l’orifice entre l’estomac et le duodénum, ou du duodénum lui-même. L’obstruction peut provoquer des symptômes tels que des douleurs abdominales, des nausées, des vomissements, une perte de poids ou une déshydratation. L’obstruction peut être traitée par chirurgie, qui consiste à enlever l’ulcère ou à élargir le pylore, ou par dilatation endoscopique, qui consiste à insérer un ballon ou une endoprothèse pour élargir la zone rétrécie.
Le cancer, qui est la complication la plus grave de l’ulcère gastrique. Il survient lorsque l’ulcère se transforme en une tumeur maligne, qui peut envahir les tissus et les organes voisins, ou se propager à d’autres parties du corps. Le cancer peut provoquer des symptômes tels que des douleurs abdominales, une perte de poids, une anémie, une difficulté à avaler ou un ictère. Le cancer peut être traité par chirurgie, qui consiste à enlever la tumeur et les ganglions lymphatiques proches, ou par chimiothérapie.